Episode #24 - Evaluer la performance autrement qu’à la tête du client
Bonjour à toutes et à tous,
Nous vous avons préparé un épisode d’actualité en cette période !
En début d’année, dans de nombreuses entreprises, ont lieu les entretiens annuels. Un évènement aussi redoutable que redouté…
Bonne lecture !
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🛶 La galère du jour : Comment évaluer de manière factuelle le travail de son équipe ?
Vous avez remarqué que Christophe, un collaborateur de votre équipe, est particulièrement impliqué dernièrement. C’est curieux, car il était plutôt en roue libre ces derniers mois…
Vous avez compris ? Eh oui ! C’est la période des entretiens annuels qui approche ! Et Christophe a bien envie de marquer des points faire oublier son dilettantisme des semaines précédentes.
En tant que manager, comment se préparer pour évaluer la performance de manière factuelle ?
🧨 Mesurer la performance individuelle : une mission impossible ?
La majorité des entreprises a un système formel pour évaluer la performance. Cette évaluation, souvent annuelle, sert à mener des discussions permettant aux personnes de s’améliorer, et à revoir les rémunérations de manière méritocratique.
Olivier Sibony, dans son excellent ouvrage “Vous allez redécouvrir le management” résume le fond du problème de manière tranchante :
Les évaluations de performance n’évaluent pratiquement pas la performance.
Et cette conclusion fait consensus dans la communauté scientifique !
L’identité de l’évaluateur et le hasard ont bien plus d’influence sur l’évaluation que les réalisations de l’évalué. En synthèse, si vous souhaitez évaluer de manière fiable la performance de votre équipe, le principal problème : c’est vous !
⛔ Attention aux boulettes (et aux biais) !
Vous avez beau avoir les meilleures intentions pour évaluer, de manière équitable, la performance de vos collaborateurs, vous n’échapperez pas à vos biais cognitifs.
Biais de disponibilité
Les réalisations et interactions les plus récentes (positives ou négatives) peuvent avoir une influence disproportionnée sur votre jugement.
Les collaborateurs les plus stratèges le savent bien : il faut tout donner 2-3 mois avant l’entretien annuel. Le reste de l’année, on peut être “à la cool” : personne ne s’en souviendra.
Biais de confirmation
L’évaluateur peut avoir tendance à accorder plus de poids aux informations qui confirment ses croyances sur la performance du collaborateur.
Par exemple, vous êtes convaincu.e que Carine n’est pas à l’aise dans les prises de parole en public. Justement, vous l’avez vue en difficulté lors du dernier comité. Attention à ne pas oublier les multiples prises de parole où elle a été très pertinente et qui démontrent ses progrès.
Erreur d’attribution
Ce biais peut nous conduire à attribuer de manière disproportionnée la responsabilité d’un succès (ou d’un échec) au seul talent d’un individu au détriment de facteurs externes.
Par exemple, imaginons que le projet de Jean-Pierre ait pris beaucoup de retard. Vous pouvez tout lui mettre sur le dos : “Jean-Pierre, tu as merdé. Tu es en dessous des attentes cette année !” ou, au contraire, le dédouaner de toute responsabilité : “Bravo, tu as très bien bossé sur ce projet. Pas de chance, l’IT n’a pas fait son job… comme d’hab’”.
Biais de contraste
Pour évaluer la performance d’un collaborateur, vous aurez peut-être le réflexe de le comparer à ses collègues. Dans ce cas, l’évaluation de sa performance peut être radicalement différente en fonction du niveau de ses pairs… C’est le biais de contraste.
Au royaume des aveugles, les borgnes sont les rois. Mieux vaut être le meilleur d’une équipe peu performante que le moins bon d’une équipe de stars.
Effet de halo
Notre biais préféré (car le plus fourbe 😈) : l’évaluateur est influencé dans son jugement par des éléments qui ne devraient pas rentrer en compte dans la mesure de la performance.
Le grand classique : l’apparence physique. Les personnes belles sont généralement jugées plus compétentes… Vous savez ce qui reste à faire pour avoir une belle évaluation : salle de sport et bistouri !
💡 Trois idées à expérimenter pour améliorer ses décisions
Tout en restant conscient.e des biais précédemment énoncés, comment reconnaître et valoriser le travail de son équipe à sa juste valeur, et permettre à chaque collaborateur de s’améliorer ?
Voici trois pistes d’action pour évaluer de manière plus fiable la performance de votre équipe…
1️⃣ Tenir un journal de bord
Votre mémoire est votre pire ennemie. En fin d’année, il est pratiquement impossible de se souvenir précisément des réalisations, succès, difficultés de chaque personne de votre équipe.
Il existe pourtant une technique très simple à mettre en place : tenir un journal pour noter de manière hebdomadaire les faits marquants concernant chaque membre de votre équipe.
Chaque semaine, vous écrivez quelques mots pour chacun.e. Par exemple, vous pouvez retranscrire :
Un évènement notable : “Email d’un client super satisfait de la résolution de son problème”
Un sentiment : “A l’air fatigué. Fait de gros horaires dernièrement”
Un rappel : “Pas d’échange cette semaine avec lui. Prendre des nouvelles semaine prochaine”
Au moment de préparer l’évaluation de performance, vous pouvez relire ce qui s’est passé les derniers mois. Cela vous aidera à prendre de la hauteur sur la période écoulée, à étayer des constats avec des exemples précis et datés…
2️⃣ Collecter les évaluations de plusieurs personnes
Puisque l’évaluation de la performance par une personne a toutes les chances d’être biaisée, une solution astucieuse est de multiplier les évaluateurs et donc points de vue.
“La moyenne de plusieurs mesures fausses est moins fausse qu’une seule mesure” - Olivier Sibony
Pour faire ça, vous pouvez demander à plusieurs personnes leur avis sur la performance de votre collaborateur : ses clients, ses collègues, des partenaires…
Deux points clés pour faire ça :
Assurez-vous que chaque personne fasse l’exercice d’évaluation seule, sans être influencée par d’autres personnes ;
Soyez précis dans les retours que vous demandez. Ex : Peux-tu décrire, selon toi, la valeur apportée par XXX sur le projet ? Quels sont ses points d’amélioration ? A quel point aimerais-tu travailler à nouveau avec lui.elle à l’avenir ?
3️⃣ Mener des entretiens de performance régulièrement
La dernière évolution, de plus en plus déployée par les entreprises, consiste à remplacer l’évaluation annuelle par des rendez-vous plus réguliers (mensuels ou trimestriels).
C’est vertueux à plus d’un titre :
Discussion sur la performance s’appuyant sur des faits récents
Une plus grande réactivité pour réagir face aux difficultés rencontrées ou identifier les besoins de montée en compétence
Possibilité de revoir les objectifs selon l’évolution du contexte
En conclusion
Le système d’évaluation de la performance parfait et infaillible n’existe pas (encore). Et, disons-le franchement, une majorité de salariés (et de managers) n’aiment pas les entretiens annuels.
Faut-il encourager la suppression de ce rituel pour autant ?
L’article “Getting Rid of Performance Ratings: Genius or Folly? A Debate” publié par Cambridge University Press, résume les débats qui ont agité des scientifiques lors d’une conférence de 2015.
Evidemment, il y a des arguments pour et contre. Ça nous fait une belle jambe !
En attendant la révolution des systèmes d’évaluation (si elle a lieu), autant faire le maximum pour que les évaluations soient le moins biaisées possible !
À bientôt pour le prochain épisode !
A chaque épisode, Onirio explore une situation managériale et vous donne des conseils pour prendre du recul et adopter les bons réflexes !
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Cette galère du management explorée avec 💙 par Onirio vous a été racontée par Jérôme Labastie